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Comptabilité générale

VII. 27. Principes généraux et règles de la comptabilité en partie double

(en anglais, Generally Accepted Accounting Principles, GAAP)

Texte

 

 

La comptabilité est l'un des systèmes d'information et de gestion (SIG) pour gérer l'entreprise.

Beaucoup d'autres SIG sont nécessaires aux gestionnaires : SIG sur la production, les ventes, les ressources humaines, les marchés, la concurrence (parts de marché, prix, structures de coût, etc.), sur les technologies (liées aux produits, à la production), etc.

La comptabilité cependant peut être vue comme le plus important des SIG : une entreprise peut être gérée pendant quelque temps sans les autres SIG, mais pas sans comptabilité.

Pour que la comptabilité produise des informations fiables et utiles, des principes et règles doivent être suivis. Ils sont classés en trois grandes catégories :

  1. que mesurer
  2. comment mesurer
  3. rester prudent et raisonnable

 

 

1. Que mesurer

1.1 Entité : il faut distinguer clairement ce qui fait partie de l'entreprise et de ses opérations et ce qui n'en fait pas partie. C'est-à-dire qu'il faut bien délimiter l'entité que représente l'entreprise. Ne mélangez pas les transactions qui l'impliquent en tant que personne morale (ses acquisitions de divers actifs, ses engagements, ses consommations, etc.) et les transactions qui lui sont étrangères, par exemple qui concernent les affaires privées des propriétaires ou d'autres agents. Les vacances du patron ne doivent pas être réglées par l'entreprise (que ce soit directement ou par l'intermédiaire de notes de frais). Elles ne doivent pas être traitées comme des consommations de l'entreprise, car elles ne sont pas un échange entre l'entité "entreprise" et le reste du monde. Inversement, il ne faut pas omettre des transactions qui font partie des opérations de l'entreprise. Lire l'histoire du propriétaire qui mélangeait ses affaires personnelles avec celles de son entreprise.

 

 

1.2 Périodicité : préparez les documents de synthèse sur une base régulière, habituellement à la fin de chaque année. Par la suite conservez toujours la même période. Un exercice dure habituellement 12 mois, car la plupart des entreprises ont des activités de nature saisonnière. Si nous employions des exercices de 9 mois, deux exercices consécutifs ne seraient pas comparables. Or les comparaisons entre exercices sont importantes pour mesurer la santé de l'entreprise.

 

 

1.3 "Going concern" : enregistrez toutes les transactions avec l'hypothèse implicite que l'entreprise n'aura jamais de fin et qu'il y aura toujours de nouvelles transactions dans l'avenir. Il existe des projets économiques qui ne sont pas des entreprises au sens business du terme – qui ne sont pas des "going concerns". Ce sont des projets avec un début, une durée et une fin. La construction d'un pont est un exemple. La comptabilité des projets bornés dans le temps est un peu différente de celle des entreprises.

 

 

1.4 Quantifiabilité : enregistrez dans la comptabilité seulement les informations quantifiables. Par exemple, une vente de $100 à un nouveau client, qui ouvre des perspectives de développement, est plus importante qu'une vente de $100 à un petit client que nous avons depuis longtemps. Elle sera néanmoins traitée de la même façon. La valeur stratégique du nouveau client est une information utile, mais n'est pas de nature comptable. De même, les qualifications des employés ne sont pas prises en compte par la comptabilité.

 

 

2. Comment mesurer

2.1 Mesures monétaires : tout doit être enregistré en unités monétaires et avec la même unité monétaire. Dans l'exemple du fabricant de jouet, avant les leçons sur les techniques comptables proprement dites, nous avons listé à la fin du troisième mois les avoirs de l'entreprise. Ils étaient de 7000 € en cash, plus une promesse de 20 000 €, plus 1000 jouets finis, plus quelques autres possessions. "1000 jouets" n'est pas un élément d'information appartenant à la comptabilité générale. La valeur des jouets doit être mesurée en euros. Des méthodes comptables existent pour évaluer les stocks. Nous étudierons certains d'entre elles dans la leçon suivante. Les firmes multinationales doivent présenter un bilan dans une devise, pas dans plusieurs. Les variations de taux de change sont un gros problème pour elles. Parfois la croissance réelle de 10% d'une filiale à l'étranger est effacée par la baisse du cours de la devise dans laquelle elle opère. Nous pouvons lire dans les rapports annuels des phrases comme : "La perte de l'année dernière a été de 7% du CA, dont la moitié due aux variations de change." Il existe des moyens de se protéger contre les variations de taux de chage. Cela s'appelle le "hedging". C'est toujours une forme d'assurance. C'est du domaine financier des options et des "futures", c'est-à-dire des produits dits structurés ou exotiques (ou parfois même "toxiques"). Ce n'est pas sans coût, comme prendre une police d'assurance, ou risque, comme le savent beaucoup de municipalités...

 

 

2.2 Coûts historiques : les actifs sont enregistrés dans les comptes à leur valeur à la date d'acquisition. En général cette valeur n'est pas modifiée par la suite "dans les livres" (= les comptes), même si la valeur de marché des actifs concernés a changé. Un cas typique est celui d'une entreprise (Michelin, par exemple) qui a acheté des terrains il y a de nombreuses années (dans Clermont-Ferrand), enregistré leur valeur au prix payé à l'époque, et, à cause du développement démographique et foncier, ces terrains valent aujourd'hui beaucoup plus qu'il y a un siècle. Nous ne changeons pas leur valeur dans les livres. Cette règle présente un inconvénient : le bilan ne donne pas une image réelle de la valeur des actifs. C'est vrai aussi des actifs financiers : même si leur valeur varie beaucoup, en général on ne la change pas dans les comptes. Par conséquent, les bilans contiennent parfois des "plus-values potentielles" - ou des moins-values. Les règles IFRS autorisent, dans certaines circonstances, à modifier les coûts historiques, et à faire ce qu'on appelle "a mark to market" (une réévaluation à la valeur de marché) de certains actifs. A l'inverse, bien que les règles de coûts historiques disent "ne changez pas les valeurs", si nous sommes sûrs que certains actifs ont perdu de la valeur de manière durable, alors une autre règle (celle de prudence, voir ci-dessous) dit d'enregistrer dès maintenant les pertes.

 

 

2.3 Date de réalisation : c'est une règle importante concernant la date d'une transaction, et donc à quel exercice elle appartient. La règle énonce que la date d'une transaction est la date de transfert de propriété des biens vendus ou achetés. Habituellement la date de changement de propriété est la date de livraison dans les entrepôts du client. Il y a des exceptions, par exemple le transfert de propriété peut par contrat avoir lieu seulement quand les biens sont effectivement payés avec du cash ou un chèque. Ces considérations ont des conséquences juridiques : en cas de dépôt de bilan, les biens qui n'appartiennent pas à l'entreprise, même s'ils se trouvent dans ses locaux, ne seront pas inclus dans les procédures de liquidation, et retourneront à leurs propriétaires.

 

 

2.4 Règle de correspondance : à nouveau une règle importante : dans la préparation du compte de résultat pour la période [t1, t2] doivent être pris en compte seulement les ventes et les coûts correspondant à cette période. Si le premier décembre, nous payons trois mois de loyer d'avance, et l'exercice se termine le 31 décembre, seulement un tiers de ce loyer correspond à l'exercice en cours. Nous avons déjà vu cette règle dans la leçon sur les charges constatées d'avance.

 

 

2.5 Aspect dual : ce n'est que le rappel qu'une transaction fait intervenir deux comptes, un qui est débité et un qui est crédité. C'est la traduction technique du fait qu'une transaction est toujours un double mouvement de valeur, ordinairement une valeur qui sort de l'entreprise et une autre qui entre.

 

 

2.6 Matérialité : nous créons des comptes différents pour distinguer des coûts ou des actifs ou des engagements de nature différente, mais nous ne créons pas de nouveaux comptes pour des différences insignifiantes. Par exemple nous pouvons avoir un compte "consommables de bureau", mais nous n'aurons pas de comptes séparés pour les crayons et pour les gommes. Dans le même esprit, dans notre logiciel de courriel nous ne créons pas un nouveau dossier pour chaque courriel entrant (même si il est forcément un peu différent des précédents) car le système de classification n'aurait plus de sens ni d'utilité.

 

 

3. Rester prudent et raisonnable

3.1 Prudence : c'est toujours une source d'étonnement pour les néophytes, mais nous avons une certaine liberté dans la façon d'enregistrer les transactions et tenir la comptabilité. C'est par exemple le cas avec les provisions. La règle énonce : quand nous avons le choix entre plusieurs méthodes, il faut adopter celle qui minimise le bénéfice. Ainsi nous sommes prudents. C'est du reste l'une des justifications de la règle des coûts historiques. Il est facile d'être trop optimiste avec nos comptes et de montrer un profit induisant en erreur ou artificiel. Cela peut conduire à des difficultés – se retrouver à court de cash, ou devoir faire d'importantes écritures de pertes et profits (= "write-off").

 

 

3.2 Cohérence : quand nous avons adopté une méthode comptable pour traiter tel ou tel type de transaction, nous devons nous y tenir dans les exercices suivants. C'est important car l'une des fonctions de la comptabilité est de suivre les performances de l'entreprise au cours du temps. Si nous changions les procédures comptables, nous aurions des résultats non comparables d'une année sur l'autre. Cette règle s'applique en particulier aux amortissements : si nous avons choisi de déprécier les véhicules neufs sur cinq ans, nous devons conserver cette règle pour les véhicules que nous acquerrons dans l'avenir.

 

 

3.3 Objectivité : nous ne devons pas introduire de jugement subjectif ou partial dans nos comptes. Si nous avons adopté un ensemble de procédures pour les provisions pour clients douteux qui doit nous conduire à provisionner la créance sur tel ou tel client, nous ne devons pas dire "oh celui-ci ne le provisionnons pas car c'est un ami..." ou car on "sent" qu'il devrait s'en tirer. Soyons objectif et impartial.

 

 

3.4 Importance : mettre seulement les informations importantes dans la comptabilité et ses annexes (pas d'annexes de 200 pages...)

 

Ces principes et règles ne sont que la formalisation d'une approche très naturelle pour tenir la comptabilité et ne demandent donc pas de gros efforts de mémorisation. Ils ont pour but de rendre les documents comptables aussi fiables et utiles que possible.

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