La monnaie solidaire de Toulouse rencontre un meilleur accueil que prévu

Après Lille, Grenoble et Rennes, Toulouse s'est dotée d'une monnaie complémentaire. Le « sol violette » vaut 1 euro et s'échange dans 40 commerces et entreprises de l'économie sociale et solidaire.


par Laurent MARCAILLOU, Les Echos

3 août 2011

C'est un nouveau billet à l'effigie du Capitole. Le « sol violette » -sol pour solidaire -a été lancé le 6 mai à Toulouse avec l'autorisation de la Banque de France. Cette monnaie complémentaire en coupures de 1,5 et 10 sols peut être échangée dans une quarantaine de commerces et d'entreprises de l'économie sociale et solidaire.

Les Toulousains peuvent acheter des sols au Crédit Coopératif et au Crédit Municipal. Le sol vaut 1 euro ou presque : l'utilisateur gagne 5 % à l'achat contre des euros et perd 5 % à la revente. Il doit aussi prendre une carte d'adhésion de 15 euros dont le produit est reversé à des associations de chômeurs. La monnaie est gérée par un comité d'agrément réunissant des entreprises du réseau, les deux banques et la mairie. La ville a injecté 120.000 euros dans le dispositif, qui a reçu des aides du Crédit Coopératif, de GRDF, de la Caisse des Dépôts, la Macif, etc. L'imprimerie municipale a frappé les billets dotés d'un code à bulles infalsifiable fabriqué par Prooftag à Montauban. Pour lancer la monnaie, la ville a donné 8 cartes de 30 sols à chaque commerçant du réseau pour qu'ils les distribuent à des « ambassadeurs ». Elle attribue aussi 30 sols par mois pendant six mois à 90 familles au chômage des quartiers en difficulté.

« Réflexion sur l'argent »

Monnaie « anti-spéculation », le sol perd 2 % de sa valeur s'il n'est pas échangé pendant trois mois (les commerçants tamponnent les billets pour vérifier leur rotation). Cette dépréciation doit inciter les porteurs à l'utiliser rapidement. « Le sol instaure une réflexion sur l'argent pour montrer que l'échange n'est pas que financier, il s'inscrit dans la promotion d'échanges moins capitalistiques », affirme le maire, Pierre Cohen (PS). « 27.000 sols sont mis en circulation pendant six mois puis l'on fera un bilan de leur utilisation, explique Jean-Paul Pla (PCF), conseiller municipal délégué à l'économie sociale et solidaire. D'ores et déjà, nous avons récolté 500 adhérents en un mois au lieu d'un an comme prévu. Les monnaies complémentaires créées à Lille, Grenoble et Rennes ont eu 1.000 adhérents en trois ans. Le sol intéresse les gens fatigués du système, qui veulent entrer dans une démarche vertueuse. »

La librairie Terra Nova n'enregistre encore que deux à trois achats par semaine en sol. En revanche, la Biocoop ouverte en mars au centre-ville a encaissé 800 sols en moins d'un mois. « J'ai des achats en sol tous les jours, se félicite sa propriétaire, Sylvie Delpech. Comme je n'ai pas encore de fournisseurs qui acceptent les sols, je rembourserai mon emprunt au Crédit Coopératif avec la monnaie solidaire. » Le comité d'agrément veut élargir le réseau pour permettre à la monnaie de tourner. De son côté, la ville a mis en place en 2009 un dispositif de soutien aux créateurs d'entreprises sociales et solidaires qui a déjà suivi 100 projets.

Laurent Marcaillou

 

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